Depuis de nombreuses années, les carburateurs ont disparu de nos véhicules. Ces accessoires essentiels, assurant l’alimentation des cylindres en carburant, ont été remplacés par un dispositif plus complexe, mais plus performant, constitué d’une pompe haute pression et d’injecteurs. Les carburateurs connaissaient leurs limites et leur comptant de problèmes. Comme toute mécanique, les injecteurs, s’usent, se dégradent avec le temps et peuvent présenter, aussi, des dysfonctionnements. Dans le meilleur des cas, cela se traduit par de mauvais rendements et/ou un déficit de confort, dans la pire par l’immobilisation totale. Ce dossier fait le point des signes annonciateurs d’injecteurs défectueux.
Mode de fonctionnement du système d’injection
Pour appréhender le principe de fonctionnement de l’injection de carburant, il faut en définir préalablement le mode, car pour simplifier, deux systèmes coexistent :
- L’injection directe, plus performante (surtout à bas régime), moins polluante et moins bruyante, consiste à vaporiser le carburant directement dans le cylindre, au niveau la tête de piston, que moteur soit un diesel ou à essence.
- L’injection indirecte se déroule de façon différente, selon le type de moteur. Dans les moteurs diesel, le gazole est pulvérisé dans une chambre dite de précombustion, fixée par sertissage dans la culasse et communicant avec le cylindre. Les moteurs à essence n’étant pas équipés de chambre de précombustion, la pulvérisation s’opère dans la tubulure d’admission. Notez que ce mode d’injection, surtout destiné à réduire les claquements du moteur, n’est plus employé sur les voitures récentes.
Dans les deux situations, la distribution de carburant s’effectue à travers des injecteurs. Notez cependant, que ces injecteurs sont légèrement différents d’aspect et de configuration. Ces petits mécanismes de très grande précision, en forme de tube de quelques centimètres de longueur, dans lesquels circule le carburant, sont mis préalablement sous haute pression par la pompe à injection, elle-même alimentée par une pompe basse pression. Les injecteurs sont pourvus d’un dispositif de fermeture, sorte de vanne ne s’ouvrant qu’au moment précis où le cylindre-moteur en a besoin. Cette injection (d’où le nom donné à ces pièces), est dosée et commandée par un dispositif électronique très performant, ayant remplacé, dès la seconde moitié des années 1960, l’injection mécanique. Par rapport au carburateur d’antan, l’injection électronique permet à la fois une diminution sensible de la consommation de carburant, par maîtrise de l’apport (richesse), sans excédant inutile, une plus grande longévité de la mécanique (pas de lavage des cylindres) et une baisse conséquente de la pollution atmosphérique, du fait, notamment de la réduction des gaz brûlés et des rejets d’imbrûlés. Ces dosages sont pilotés par un calculateur, qui gère, plusieurs milliers de fois chaque minute, le temps d’ouverture (débit) et le signal d’injection.
Composition d’un injecteur
L’injecteur ressemble donc à un banal tube, sur l’extrémité duquel est vissée la tubulure d’alimentation en carburant. En réalité, sous cet aspect anodin, se cache un mécanisme de précision horlogère, devant subir des efforts comparables à ceux d’un marteau-piqueur. Cet apparent paradoxe est rendu possible par la mise en œuvre d’une centaine de pièces, parfois minuscules. L’injecteur, terminé par une buse dont le profil du siège est spécifiquement élaboré pour permettre une pulvérisation optimale, n’apparaît que lorsque la pièce est déposée. La partie visible (porte-injecteur), contient l’ensemble des électrovannes, plaques d’induit, soupape, guides, tiges, aiguilles, billes, écrous, rondelles, clips, cales, ressorts, etc., nécessaires pour faire ouvrir à un instant précis, ce que l’on nommait, autrefois le pointeau, aujourd’hui la pièce de pression. On ne s’étonnera donc pas, qu’un mécanisme aussi sophistiqué et aussi violemment sollicité, soit soumis à un remplacement périodique (±200 000 km) et sujet à un certain nombre de pannes !
Prévenir, c’est guérir
Avant d’évoquer ce sujet, il est intéressant de constater que la première cause de dysfonctionnement des injecteurs n’est pas une panne à proprement parler, mais une méconnaissance des règles élémentaires d’entretien. En effet, il ne s’agit au départ que d’un encrassement provoqué par la calamine produite par la combustion (diesel) ou les explosions répétées (essence), du carburant dans le cylindre. Pour faire durer plus longtemps vos injecteurs, et d’une façon plus générale le moteur de votre voiture, il est souhaitable de s’entourer de trois précautions préventives :
- N’utilisez que du carburant de meilleure qualité. N’hésitez pas, tous les 2 ou 3 pleins, à remplir le réservoir avec un carburant additivé. Vous pouvez, à défaut, y mélanger une dose de produit de grande marque, spécifiquement conçu pour le nettoyage de l’ensemble du circuit d’alimentation. Cela devrait largement retarder l’encrassement qui, à terme, provoque de véritables pannes. Ces additifs ont également la vertu de lubrifier les organes en mouvement de la pompe et des injecteurs. S’il est possible d’éliminer certaines impuretés et la calamine en couche fine sur la tête d’injecteur, un encrassement trop prononcé provoque des bouchons irréparables. Il faut remplacer l’injecteur. Notez qu’un nettoyage professionnel à l’hydrogène, donne de bons résultats, si vous vous y prenez assez tôt, mais pour un coût dissuasif (±100 €).
- Utilisez une huile d’excellente qualité. Les huiles de bas de gamme peuvent accentuer la formation de calamine.
- Évitez de laisser trop baisser le niveau de carburant dans le réservoir, surtout en hiver. L’humidité ambiante comble le volume laissé libre et condense en gouttelettes, s’accumulant au fond du réservoir. Or, l’eau est l’un des pires ennemis du circuit d’alimentation en carburant, qu’elle dégrade par corrosion. Il en découle des accumulations de rouille, pouvant être véhiculés dans le circuit, colmatant les filtres et dont d’infimes particules peuvent atteindre et boucher le conduit capillaire de gicleur.
Bien heureusement, ces ennuis ne surviennent pas sans quelques signes annonciateurs ! Il est alors, encore temps, dès leur apparition de réagir, pour sauver les injecteurs.
Comment évaluer la souffrance d’un injecteur ?
Les signes mettant en évidence un injecteur défectueux, ne sont pas toujours très clairs et peuvent facilement être assimilés à des causes plus communes. Comme souvent pourtant, un diagnostic précoce permet de résoudre le problème plus facilement et à moindres frais. Restez donc vigilants ! Revue des 8 signes de dysfonctionnement d’injecteur les plus courants :
1 – Consommation de carburant anormalement élevée
Un surplus de consommation doit alerter sur l’éventualité d’une défaillance d’injecteur. Le plus souvent, la portée du siège de la pièce de pression, cratérisée, laisse fuir le carburant à des moments inopportuns. Les professionnels disent que l’injecteur « pisse ». L’expression est triviale, mais a le mérite de la clarté ! Pour conserver votre rythme habituel de conduite, vous devez, instinctivement, compenser en appuyant davantage sur l’accélérateur. Le phénomène passe facilement inaperçu, mais si l’on prenait l’habitude de contrôler souvent la consommation moyenne ou simplement de consulter l’ordinateur de bord, cela sauterait aux yeux. Malheureusement, souvent, lorsque le problème devient évident, il est trop tard. L’injecteur, trop abîmé pour être réparé, doit être remplacé. Pour finir ce signe sur une note réconfortante, il peut arriver qu’une minuscule impureté coincée sur la portée de fermeture fasse pisser l’injecteur. Si, après un laps de temps plus ou moins long, elle est naturellement éjectée par le flot de carburant, tout rentre dans l’ordre sans dommage.
2 – Fumée noire s’échappant en nuage épais du pot d’échappement
Il faut comprendre qu’un injecteur défectueux, engendre une diffusion du carburant anarchique. De lourdes gouttes se mêlent au flux de brumisation vaporeux, prévu par le concepteur. Logiquement, cet apport trop important en carburant, ne peut participer à la combustion, par manque d’air, mais trop chauffé pour rester en l’état, il se transforme en particules de carbone solide évacuées dans l’atmosphère sous forme de fumée noire. Il s’agit, en fait, d’une aggravation du signe précédent, plus flagrant sur les moteurs diesel. À ce stade, pas d’autre solution pérenne que de remplacer l’injecteur. Comme rien n’est simple en mécanique, l’émission de fumées noires peut avoir d’autres origines : vanne EGR encrassée, capteur de débit d’air défectueux, filtre à air colmaté, segments de piston endommagés… Dans tous les cas, il faut rechercher la cause du déficit d’oxygène pour une combustion optimisée.
3 – Tremblements ou à-coups à l’accélération
Un effet de trous ou de vibrations à l’accélération peut encore être symptomatique de vaporisation défectueuse du mélange gazeux. L’accélération brutale est une phase de carburation qui réclame une grande quantité de mélange gazeux. Si votre ordinateur de bord affiche la consommation instantanée, il est facile de vérifier qu’à ces moments la consommation atteint des sommets. Une mauvaise alimentation en carburant, pour cause d’injecteur en partie obturé, se traduit par cette réaction de protestation du moteur. Les autres causes de ces staccatos désagréables et préjudiciables à la mécanique peuvent être, une fuite d’air dans le circuit, une dysfonction du calculateur, une prise d’air sur la durite de turbo, une déficience du boîtier papillon, etc.
4 – Claquements sourds provenant du moteur
S’il est un bruit anormal angoissant, c’est bien celui-là ! Pour les personnes ayant connu des ennuis de moteur graves, ces claquements sinistres ressemblent à s’y méprendre à un embiellage en fin de vie, sans apparition toutefois de voyant rouge d’alerte de pression d’huile. En fait, une fois encore, il s’agit là de la manifestation de mécontentement d’un ou de plusieurs injecteurs encrassés ou grippés. Dès l’apparition de ces bruits, il fortement recommandé de s’arrêter chez le premier spécialiste rencontré. En effet, les claquements sont le stade suivant les manifestations précédentes, signe patent d’aggravation de la situation. Les risques de panne sèche sont réels et le remplacement des injecteurs probable ! Les causes de ce dysfonctionnement sont à rapprocher des défauts d’alimentation évoqués précédemment.
5 – Odeur de carburant dans l’habitacle
Un injecteur qui fuit, laisse passer vers l’échappement des gouttes de carburant imbrûlé. Pour peu qu’une vitre arrière ou le haillon soit ouverts, les gaz d’échappement, chargés de carburant, entrent dans la voiture. C’est désagréable, peu recommandable pour la santé des occupants et préoccupant pour l’intégrité du ou des injecteurs incriminés. Ce type d’émanation peut, en outre, endommager gravement le filtre à particule de l’échappement.
6 – Démarrages calamiteux
Mille raisons peuvent expliquer que le moteur ait du mal à se lancer. Pourtant, si le démarreur tourne normalement, on a toutes les raisons de penser à un déficit d’alimentation en carburant. Notez que ce genre d’incident peut se produire également, par grand froid, lorsque le filtre à carburant rempli d’eau, forme un bouchon de glace ! Sur les moteurs diesel, c’est le gazole lui-même qui peut geler. Réchauffer et purger l’eau contenue dans le filtre suffit le plus souvent à rétablir l’alimentation. Il est cependant à craindre que l’eau ait sournoisement abîmé l’injecteur. Soyez donc particulièrement attentifs aux réactions du véhicule, après un tel incident, surtout si les démarrages en côte doivent exiger une accélération pour éviter de caler le moteur.
7 – Variations du régime de ralenti
Moins fréquemment, les ralentis irréguliers ou notablement trop élevés peuvent provenir du « stade 1 » de salissure accidentelle des injecteurs. Cela peut provenir de longs parcours urbains réguliers ou de conditions de circulation extrêmes (montagne, chaleur…). Sorte d’avertissement sans frais, à faible risque de gravité, ces dysfonctionnements doivent être traités sans délai, pour en éviter les aggravations. Le plus souvent, un traitement par additif au carburant ou un nettoyage sérieux des injecteurs rétablit durablement la situation. Dernier détail : vérifiez, malgré tout les dates de dernier remplacement du filtre à carburant, du filtre à air et des bougies d’allumage. Sait-on jamais ?
Le pire n’est jamais certain
Pour synthétiser, les troubles de fonctionnement du moteur, potentiellement imputables aux injecteurs sont nombreux, mais il est souvent difficile d’écarter des causes annexes, tant les manifestations peuvent être approchantes. Dans l’immense majorité des situations, ils sont provoqués par le transport d’impuretés internes au circuit d’alimentation ou par des dépôts de calamine, résidus de phases de combustion/explosions mal contrôlées. La vérification efficace des conditions de fonctionnement des moteurs, nécessite un appareillage très spécialisé, une grande maîtrise des dispositifs et un savoir-faire acquit par l’expérience. C’est donc une affaire de spécialistes. Faire appel à leurs services, dès perception des premiers symptômes a certes un coût, mais augmente les chances de rapide retour sur investissement. Le remplacement des injecteurs est une intervention onéreuse, voire ruineuse selon le véhicule. Il est possible, sous certaines conditions, de l’alléger en passant par la case « réparation« , très durable si les conditions sont favorables. Seul, un homme de l’art est en mesure d’en juger la faisabilité.